Rencontre avec Jennifer Macavinta, danseuse installée à La Rochelle

Le paysage artistique de La Rochelle accueille un nouveau visage. Jennifer Macavinta est danseuse professionnelle depuis vingt ans. Californienne d’origine, elle s’installe à Paris avant de choisir de suivre les effluves marines qui la mèneront jusqu’à La Rochelle. Après avoir écumé les scènes internationales, son but est désormais d’ouvrir son « art du mouvement » au plus grand nombre. Rencontre avec une artiste contemporaine qui a choisi de faire de la danse une philosophie de vie et de partage.

(c)-Antoine-Conjard-arttes
© Antoine Conjard

Avant de devenir danseuse professionnelle, tu t’étais engagée dans des études de kinésithérapie à l’Université de Long Beach en Californie. Dans quelles circonstances la danse est-elle venue à toi ? 

Mon initiation à la danse s’est d’abord faite par la musique classique à l’âge de 6 ans. A 16 ans j’ai commencé à prendre des cours de danse mais juste pour le plaisir. J’ai ensuite continué la pratique de la danse à l’Université mais seulement en option de mes études de kinésithérapie. Ce n’est qu’au début de ma troisième année que j’ai réellement compris que la danse faisait partie intégrante de ma vie, qu’elle était comme ma langue maternelle. J’ai alors décidé de continuer mes études uniquement en danse moderne.

Quelles ont été tes principales influences ? 

La télévision ! A l’âge de 10 ans, j’ai découvert des noms de grands chorégraphes de danse contemporaine comme Merce Cunningham, grâce à des documentaires qui passaient sur la chaîne américaine PBS. Bill T. Jones et Martha Graham sont aussi des références pour moi par leur vision de la danse.

Plus tard, à l’université, j’ai eu comme professeurs Susan Mc Lain (une des premières reprises de solos de Martha Graham), Jeff Slayton (un des danseurs originels de Merce Cunningham) et Keith Johnson (qui a collaboré avec Bill T. Jones). C’est ce dernier qui m’a poussée à exploiter tout mon potentiel et à continuer sur une voie professionnelle.

Et ensuite, quel a été ton parcours en tant que professionnelle ? 

Après l’obtention de mon diplôme, j’ai beaucoup auditionné à New-York. A 25 ans, j’ai été sélectionnée parmi 300 candidates pour intégrer une compagnie de danse très renommée, le Pilobolus Dance Theatre.

En fait, Pilobolus est plus qu’une compagnie de danse. On y fait aussi du théâtre trés physique. Et ce qui m’a particulièrement plu c’est le fait qu’elle encourage et mette en avant le travail de tous ses artistes. Sur les 7 années passées au sein de cette compagnie, j’ai ainsi pu participer à la création de 12 pièces.(1)

En 2005, tu t’installes à Paris. Parle-nous de ton parcours depuis ton arrivée en France. 

© Isadora Genthe
© Isadora Genthe

D’abord, j’ai continué à travailler avec Pilobolus et à faire des allers-retours France-Etats-Unis jusqu’en 2008. En parallèle, en 2006, j’ai remporté le concours Talents Danse Adami à Paris, qui récompense les artistes-interprètes en les intégrant à des équipes dirigées par des chorégraphes de renom. C’est ainsi que j’ai fait la connaissance du chorégraphe Pedro Pauwels. Ma collaboration

avec lui n’a pas été de tout repos. Il peut être très dur et exigeant. Mais j’avais tant d’admiration et de respect pour son travail que je suis restée à ses côtés pendant 7 ans.

Cette année, j’ai collaboré avec le musicien Denis Charolles en tant que chorégraphe et principale interprète de L’enfant et les sortilèges(2), conte musical écrit et composé par Colette et Maurice Ravel.

Avec quels chorégraphes français ou européens aimerais-tu travailler ? 

James Thiérée et Yuval Pick.

Chez James Thiérée, j’aime son humour et sa façon de mouvoir son corps dans donner l’impression de danser.

Chez Yuval Pick, j’aime le style qu’il donne à ses mouvements, sa rythmique sauvage.

Et à La Rochelle ? 

© TED conference
© TED conference

Pourquoi pas collaborer avec Kader Attou pour mélanger tous les styles de danse ? Quelle que soit la technique ou l’origine de la danse, un danseur reste un danseur. La base est la même pour

les danseurs de tous les horizons. Je ne veux pas mettre d’étiquette sur tel ou tel style même si je suis consciente que le public a besoin de ce type d’identification.

De la même façon, je souhaite m’affranchir du côté professionnel et élitiste de la danse. Je trouve même plus intéressant de travailler avec des “non-danseurs” car leur corps est encore vierge de tous styles.

Pour mon entraînement, je suis les cours de John Bateman. Et j’aime aussi suivre les cours de danse classique d’Anne-Cécile Angel qui respecte le fait que je sois une professionnelle mais qui n’hésite pas à me corriger, car je ne suis pas du tout une danseuse classique !

Désormais bien installée à la Rochelle, tu viens de créer ta propre association de danse, Single Whip. Quels sont ses objectifs ? 

L’activité première de mon association est la création d’événements et de performances artistiques à La Rochelle et son agglomération.

En parallèle, je donnerai des cours de danse contemporaine à des adultes et des enfants, amateurs ou professionnels.

Je souhaite avant tout partager mes valeurs et ma vision de cet art. La danse ou plus largement, l’art du mouvement, doit être accessible à tous, d’où qu’ils viennent. Quel que soit le niveau des participants, il est important que tout le monde se sente bien dans sa tête et dans son corps. A travers la pratique de cet art, peut-être pourront-ils y voir une chance de se retrouver en eux-mêmes ?

Ton association Single Whip propose un premier événement au bar culturel l’Aiôn, intitulé Danse la poésie(3). Quel en est le concept ? 

La première partie est consacrée à une performance improvisée que je partagerai avec une auteure, Floriane Durey. A travers un texte écrit et dit par Floriane, j’exprimerai mes émotions par les mouvements de mon corps.

Le but de cet événement est de montrer au public qu’il est possible de faire de la danse sans être dans un théâtre et sans qu’il y ait une structure précise. C’est une rencontre entre les mouvements et les mots.

Le deuxième partie sera dans la même veine exceptée que, cette fois-ci, c’est le public qui est invité à écrire, lire à haute voix ou danser en toute liberté.

As-tu d’autres projets en cours ou à venir ? 

Actuellement, je travaille en collaboration avec deux autres danseurs parisiens, Anne Charpentier et Carlos Sanchez, sur la création d’une pièce qui pourrait être prête pour 2016.

Autrement, j’espère rencontrer d’autres danseurs localement ou des associations pour participer à des événements culturels de tous types.

Et bien sûr je souhaite développer l’activité de mon association, accueillir des adhérents et à travers eux construire un langage propre à Single Whip.

***

Ida Hem Reun

Deuxième photo : © TEDconference

Troisième photo : © Antoine Conjard

(1) Conférence TED 2005 – A dance of « symbiosis » par la compagnie Pilobolus, chorégraphie de Michael Tracy en collaboration avec Otis Cook et Renée Jaworksi. (source TED.com)

(2) “l’Enfant et les sortilèges” en collaboration avec la cie “les Musiques à ouïr” de Denis Charolles, chorégraphie de Jennifer Macavinta. (photo: Antoine Conjard)

(3) DANSE LA POÉSIE – dimanche 31 mai (19h)

à L’Aiôn – Bar Culturel & Solidaire, 41 rue de la Scierie à la Rochelle :

https://www.facebook.com/aion.larochelle/events?key=events

Renseignements pour participer à cet événement : Association Single Whip – 06.18.85.82.61 – ciesinglewhip@gmail.com

Check Also

Véronique Maxin, un univers ludique et coloré

Véronique Maxin exerce son art à Saint Rogatien, en Charente-Maritime. Véronique Maxin réalise des sculptures …